Cézanne : nature morte avec pot de gingembre |
A notre époque, il est banal de trouver dans un coin de cuisine ou à l'épicerie du quartier, ces fameux rhizomes de Zingiber officinale. Les préparations culinaires du monde entier deviennent accessibles. Dans ce mouvement, les influencent se croisent et la nouvelle cuisine française s'est vue émoustillée par des épices en tous genres, dont le Gingembre. Nos voisins les Grands-bretons ne l'avaient jamais perdu de vue avec les marmelades et les biscuits au Gingembre. Nos cousins Germains et d'Europe centrale ont toujours aimé réchauffer leur gâteaux et leurs plats d'épices lointaines.
Mais il ne faut pas oublier que c'est l'art culinaire développé au long du Moyen-âge qui a donné au Gingembre ses lettres de noblesse dans nos assiettes européennes. A cette époque, les palais sont friands d’épicés, d’aigre doux, et de miel, préféré au sucre car beaucoup plus accessible.
Les premiers textes culinaires en France datent de l'an 1300 environ. Il s'agit de traités à l'usage des grands de ce monde et ils font la part belle aux épices venues de l'Orient. C'est de cette époque que date "Le Viandier", écrit par celui que l'on nomme Taillevent (Guillaume Tirel, 1310-1395 ) et que l'on peut considérer comme le premier grand cuisinier français. Le gingembre s'y retrouve dans de nombreuses recettes, comme celle-ci recommandé pour les jours maigres, dans le langage de l'époque (ce que vous ne comprenez pas, inventez-le) :
"Pour faire souppe à moustarde, pour jour de poisson, prends oeufz fris à l'uyle ou au beurre, et puis ayés pure moutarde, canelle, gingembre, menues espices comme cloux, et graine, et sucre raysonnablement; coulé tout ensemble et boullir en ung pot, et deffait de vert jus, et gouter de set ainsi qu'il appartient, et mettés le bouillon à part."
Maintenant, si vous souhaitez donner une petite allure médiévale à votre cuisine, voici la recette, modernisée mais fidèle, d'une sauce très employée au Moyen-âge pour accompagner le poisson : la "Cameline à l'ail et au gingembre" (le nom vient de sa couleur qui rappelle celle des chameaux). Pour la préparer, vous pilez 4 gousses d'ail en pommade dans un mortier, vous ajoutez 1 cuillerée à café rase de gingembre en poudre et un peu de sel. Vous mouillez ensuite 3 tranches de pain avec 8 cl de vinaigre, puis vous les essorez et vous les écrasez. Ensuite vous délayez le tout dans 10 cl d'eau ou de bouillon tiède. Malaxez, ajoutez quelques feuilles de persil et d'oseille ciselées. Faites cuire doucement. Lorsque la sauce est homogène, ajoutez-la au poisson qu'elle doit parfumer.
Vous voyez que, contrairement à certaines idées reçues, nos gastronomes médiévaux ne se baffraient pas de viandes faisandées et dégoulinantes de graisses douteuses accompagnées de brouets écoeurants.
Et puis, quand l'hiver arrive, quand les nuits deviennent longues, que le soleil pâle éclaire mais ne réchauffe pas, que la neige recouvre de son blanc manteau nos petits villages transis de froid (si vous habitez en ville et dans le midi, vous imaginez), quand les enfants s'impatientent de voir arriver Noël ou bien qu'ils ont déjà cassé tous leurs nouveaux jouets, qu'il y a-t'il de plus agréable qu'un bon vin chaud, celui-ci étant le descendant de l'Hypocras médiéval, vin fortement sucré avec du miel auquel était ajouté de la cannelle et du gingembre.
Pendant que nous sommes plongés dans les saveurs des épices, et pour vous permettre de gâter vos grands-parents et vos petits-enfants, voici une recette simple de "Pain d'épices" et qui plus est, sans oeufs. Il vous faut réunir pour 8 personnes : 250 gr de farine, 200 gr de miel liquide, 50 gr de sucre roux, 10 cl de crème liquide, 1 sachet de levure, 1 sachet de sucre vanillé, 1/2 cuiller à café de mélange des 4 épices suivantes : gingembre, cannelle, girofle, muscade. Vous mélangez tous les ingrédients dans un robot, puis vous versez le mélange dans un moule à cake beurré et vous faites cuire au four th.6 (170°C) pendant 45 min environ.
Évitez toutefois d'utiliser un moule en forme de "bonhomme" ou alors fermez bien les fenêtres pour qu'il ne vous arrive pas la même mésaventure qu'à la vieille dame des livres de notre enfance. Bien que très connue, cette histoire est toujours appréciée des petits et je vous la rappelle pour que vous puissiez vous en servir pour la fameuse "histoire avant de s'endormir" de vos bambins. Je compte sur vous pour l'enjoliver de détails à votre convenance et lui ajouter de multiples épisodes aventuriers.
"Il était une fois, une vieille dame qui vivait dans une vieille maison à la campagne. Un jour elle décida de faire une surprise à ses petits enfants qui viendraient la visiter. Je vais leur cuisiner un de mes délicieux pains d'épice qu'ils aiment tant. Elle eu l'idée de donner à son gâteau la forme d'un petit bonhomme. Elle prépara la pâte et mit le gâteau au four.
Hum ! que ça sent bon !
" Ce petit bonhomme de pain d'épice
devrait être prêt maintenant."
La vieille dame ouvrit la porte du fourneau.
Et hop ! le petit bonhomme de pain d'épice s'enfuit aussitôt par la fenêtre."
Mais le Gingembre possède d'autres vertus que celles de parfumer nos cuisines et de nous faire retomber en enfance. La pharmacopée chinoise et l'ayurveda lui font une belle place et la science occidentale commencent à l'étudier sérieusement. C'est ce que j'aimerai évoquer dans la suite de mon article.
Merci de votre visite et à bientôt !
Philomènement vôtre.
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