L'art des chamanes, le plus archaïque de tous les arts thérapeutiques remontent à l'origine de l'humanité. Si le terme "chamane" nous a été transmis par le russe, et si le chamanisme au sens strict est un phénomène sibérien et central-asiatique, l'expérience chamanique est attestée à peu près partout dans le monde. Partout le chamanisme se caractérise par une même vision de l'univers, avec trois niveaux de réalité : un macrocosme (le ciel), un microcosme (la terre) et le monde inférieur peuplé d'esprits (le chaos). Ces trois espaces-temps sont interactifs et reliés par un "axe du monde". Dans l'ère sibérienne, le Bouleau est un arbre cosmogonique,centre du monde et pilier du ciel.
Le Bouleau sert de médiateur. Voici le récit du voyage spirituel d'un chaman samoyède. Dans son rêve, le chaman flotte au-dessus des neufs mers. Au centre de la neuvième, il aperçoit un Bouleau extraordinaire qui perce le ciel ! Cet arbre domine les neufs herbes, il comporte neufs branches et les "neufs vieux", pères des nations, occupent ses rameaux supérieurs. Le Bouleau dit alors au chaman : "Un de mes rameaux vient de tomber. Ramasse-le et fais-en un tambour qui te servira toute ta vie." Le Bouleau donna ainsi au chaman les pouvoirs suprêmes : guérir les individus et donner l'abondance.
Le Bouleau fait aussi partie de l'herboristerie des chamanes sibériens, ainsi que le pin, l'oignon, le lycopode, mais aussi l'euphorbe, la digitale, et l'ambre (résine fossile de conifères).
Partout semble-t-il, les chamanes consomment diverses plantes dont les effets provoquent de manière accélérée des états extatiques. Les plus connues de ces plantes sacrées sont en majorité des champignons dont, notamment, l'amanite tue-mouches (Amanita muscaria), qui entretient une relation symbiotique dans les sols avec le Bouleau. Les chamanes préparent leur breuvage avec les plus grandes précautions afin d'en atténuer les effets toxiques.
Ces techniques chamaniques de l'extase permettent à l'âme du chaman de s'échapper de son corps, de "s'envoler tel un oiseau". Ainsi elle se lance à la recherche de l'âme qui a été dérobée au malade ou qu'il a lui-même perdue, elle peut dialoguer avec les esprits bienveillants, négocier ou même lutter avec les esprits pervers. Lorsque le patient récupère son âme, celle-ci est purifiée. Le malade n'est pas seulement guéri, il a acquis "un plus".
Une technique d'origine chamanique est parvenue jusqu'à nous : "la purification par la vapeur d'eau". Ainsi le sauna s'est répandu en Europe depuis la Finlande qui s'appelait Finnmark, la "terre des chamanes". Les populations occupant le nord de l'Eurasie ont pour tradition de se fouetter de branches souples de Bouleaux tout en alternant des bains de vapeur et de chaleur sèche, avant de se frotter de neige. Peut-être préférez-vous les saunas bien aseptisés des "spas" modernes ?
Les techniques de guérison chamanique des Amérindiens comprennent, elles aussi, une forme d'élimination des toxines qui se pratique dans une "sweat-lodge" ou hutte de transpiration. Mais il s'agit d'autre chose que de "prendre une bonne suée" ! En effet, "la Sweat-Lodge est un moyen de se purifier, de se soigner en éliminant toutes les toxines accumulées dans le corps. Du point de vue spirituel, c'est un rite qui nous prépare à voir en nous-même et à recevoir les esprits; à nous éclaircir intérieurement de façon à entrer en communion avec la nature et toutes les choses créées, symbolisées autour de nous par les branches de saule, les pierres, l'autel, l'eau et le feu." Si vous êtes tentés par cette expérience forte et engageante, soyez vigilant, cela ne s'improvise pas !
Il est l'heure de clore cet article sur le Bouleau. En l'honneur de cet arbre de sagesse, j'aimerai reprendre le premier couplet de la chanson "Gens du pays" :
"Le temps qu'on a pris pour dire je t'aime,
C'est le seul qui reste au bout de nos jours.
Les voeux que l'on fait, les fleurs que l'on sème,
Chacun les récolte en soi-même,
Au beau jardin du temps qui coure."
Pour la suite de mon dictionnaire Z'amoureux, j'aimerai vous emmener à la rencontre d'une modeste simple de nos jardins, avec "C" comme "Camomille".
Merci de votre visite et à bientôt !
Philomènement vôtre.
Au boulôt on fait ce qu'on peut, à table on se force. C'est ainsi que mon père nous a forcé à finir le contenu de nos assiettes.
RépondreSupprimerExcellent écrit sur le bouleau des chamanes. Bravo!
RépondreSupprimer