mercredi 1 août 2012

Le Sureau noir, pharmacien de la maison


Avide d'azote et d'eau, la place du Sureau noir (Sambucus nigra, famille des Caprifoliacées) est souvent au plus près des humains. Le Sureau noir adore les vieux murs, contre lesquels ont pu s'accumuler déchets et vieux outils rouillés. Les botanistes disent que c'est une plante rudérale, du latin "rudus, ruderis" qui signifie décombres. L'ethnobotaniste Pierre Lieutaghi l'a ainsi appelé  poétiquement "le prince des décombres". Mais vous pourrez le trouver aussi dans des haies, en bordure des petits cours d'eau,...Comme il n'est pas découragé par la mi-ombre, il poussera même vaillamment dans les sous-bois.

En raison de ses nombreux usages, un Sureau noir implanté naturellement grâce à une graine voyageuse à proximité d'une maison a toujours été respecté et une plantation (par bouturage le plus souvent) compensait la nature s'il venait à manquer dans les parages des habitations.

En effet, au fil des temps et suivant les régions, le Sureau noir a été utilisé en remède dans toutes ses parties, écorces, feuilles, fleurs, fruits, voire racines. Et ceci comme remède sudorifique, diurétique, antirhumatismal, purgatif, émétique, pectoral, dermatologique, analgésique, anti-inflammatoire, cicatrisant, résolutif. 

Une pharmacie à lui tout seul, et ceci au seuil de la maison ! Cependant, dans toutes les utilisations traditionnelles, certaines s'avèrent un peu trop rudes ou incertaines et ne sont pas reprises dans les usages actuels.



Commençons par le plus agréable, les fleurs. Très parfumées, elles permettent de douces tisanes qui feront merveille dans tous les cas de refroidissement. Leur principale propriété est en effet d'être sudorifiques. Dès les premiers frissons, suivez le conseil de l'herboriste Marie-Antoinette Mulot : buvez un bon bol de tisane de fleurs de Sureau, couchez-vous bien couvert et transpirez ! Vous préparerez cette tisane en faisant infuser pendant 10 minutes hors du feu et à couvert 1 grosse cuillerée à soupe de fleurs de Sureau sèches dans 250 ml d'eau bouillante. En cas de bronchites, grippes, toux, vous prendrez 3 ou 4 tasses par jour de cette même tisane en la sucrant d'un peu de bon miel si vous le souhaitez. 

En usage externe, ce sont leurs propriétés émollientes, adoucissantes et calmantes qui seront utilisées pour des compresses ou des lotions contre les irritations de la peau, eczémas, dartres ainsi que sous forme de bains oculaires dans les cas d'orgelets, de conjonctivites ou d'inflammations des paupières. Pour ces usages, vous ferez une décoction de fleurs de Sureau en mettant 25 g de fleurs sèches dans un demi-litre d'eau froide que vous porterez à ébullition, vous laisserez bouillir 5 minutes puis infuser 10 minutes. Vous filtrerez avec soin avant emploi et vous ne le conserverez que 24 heures.



Passons aux fruits (attention de ne pas confondre avec le Sureau yèble, se reporter à la partie "à la découverte du Sureau"). Les baies de Sureau noir crues sont, à bonne dose, laxatives. Pour obtenir cet effet, c'est le suc préparé en écrasant des baies crues et bien mûres qui était utilisé. Cet usage est plutôt archaïque. 

Il est à noter que les baies de Sureau noir non mûres (encore vertes ou roses), ne sont pas consommables. Elles contiennent des substances chimiques indésirables qui régressent avec la maturité des baies (quand elles deviennent noires-violacées) et dont le reliquat disparaît à la cuisson.

Les baies de Sureau noir ont servi dans le temps à préparer du Rob, un suc concentré obtenu par cuisson et évaporation longue du jus de baies mûres jusqu'à une texture de sirop épais. Ce Rob était utilisé, à petites doses dilué dans de l'eau, en cas de grippe ou autre refroidissement.



L'écorce possède, elle, des propriétés diurétiques et légèrement laxatives. Il s'agit de ce que l'on appelle la seconde écorce, c'est-à-dire celle qui se trouve sous la couche extérieure rugueuse. Elle pourra être utilisée en décoction, notamment, en cas d'oedème, de rétention d'urine, goutte, et dans tous les cas où il faut stimuler l'élimination rénale. Les feuilles sont également diurétiques. 

Comme vous le constatez, tout cela fait "é-li-mi-ner" comme dirait une publicité. L'abbé Kneipp, qui en Allemagne au 19ème siècle a posé les bases de soins aux naturels fondés sur l'eau, les plantes et une hygiène de vie, recommandait de faire une cure dépurative de thé de feuilles de Sureau noir sur 21 jours. Mais bonjour le goût ! Il semble qu'une décoction de feuilles ait l'amertume d'un vieux pied d’artichaut bouilli. A réserver aux amateurs.


L'usage médicinal du Sureau est d'ailleurs une bonne illustration d'une hypothèse qui veut, qu'au cours des temps historiques, il y ait eu une "évolution dans la mise en oeuvre des remèdes végétaux, où l'on va de la racine à la fleur et des propriétés brutales à des pouvoirs adoucis". C'est le cas pour le Sureau puisque de nos jours c'est l'usage des fleurs qui a supplanté les utilisations des autres parties de cette plante.

Pour aller vers des évocations savoureuses, dans la suite de mon article, j'aimerai vous raconter le mini-conte de la fée gourmande du Sureau.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.


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