dimanche 31 mars 2013

L'amer qu'on voir danser...



La Gentiane jaune est une plante "tonique-amer".

Pour le Dr Henri Leclerc (1870-1955), médecin français ayant eu à coeur d'introduire de façon raisonnée les recettes traditionnelles de soins par les plantes auprès de ses malades, c'est le type de le plus parfait des toniques-amers : "Par sa composition chimique, la Gentiane réalise le type le plus parfait des amers purs; dépourvue d'astringence, elle tonifie sans irriter; son influence très nette sur la sécrétion salivaire lui permet d'impressionner les nerfs gustatifs et de contribuer à l'acte primordial qui est comme la condition sine qua non de la genèse de l'appétit".

Au titre de tonique-amer, la Gentiane possède des propriétés apéritives et digestives. C'est aussi un tonique général et elle possède des vertus fébrifuges. Ces propriétés lui viennent de sa capacité à tonifier les fonctions vitales de l'organisme et notamment le système digestif en stimulant les secrétions des sucs salivaires et des sucs gastriques, les fonctions hépatiques, ainsi que de sa capacité leucocytogène (augmentation des globules blancs).

La Gentiane sera donc prescrite en cas de manque d'appétit, de convalescence, pour aider à combattre la fièvre, prévenir les maladies infectieuses, améliorer les états de faiblesse générale et ... si tout le reste va bien ... redonner du tonus à la libido.



C'est la racine de la Gentiane qui est utilisée. Vous la trouverez séchée en morceaux dans votre herboristerie préféré.

Bien sûr, la racine de Gentiane est amère ! Il faut savoir le supporter. Cette amertume vient des principes amers qu'elle contient, des séco-iridoïdes. Parmi eux, deux détiennent le record d'être parmi les substances naturelles les plus amères au monde ! Ainsi pour ne plus détecter la saveur amère, il faut diluer l'amarogentine et l'amaroswerine, tous deux présents dans la racine de Gentiane, à 1/58 000 000 dans l'eau ! A titre de comparaison, la quinine (voir mon article sur le Quinquina) n'a un indice d'amertume que de 200 000 fois (dilution à 1/200 000 pour arriver à zéro amertume).

Dans l'histoire de la médecine, la Gentiane a d'ailleurs été prescrite pour aider à combattre les fièvres en remplacement du Quinquina lorsque les prix de celui-ci se sont mis à flamber sous la pression de la demande, et ceci avec des résultats très satisfaisants. Un mélange de plantes appelé "le fébrifuge français" était composé de Gentiane, de Camomille et d'écorce de Chêne.




Alors, sous quel mode peut-on la prescrire ? Et bien, si vous en avez le courage, vous pouvez tenter de chiquer un petit morceau de racine de Gentiane comme les montagnards d'antan ! Mais alors, un tout petit morceau et n'insistez pas si l'amertume est trop forte pour vous.

De façon tout aussi simple, vous pouvez mettre à macérer quelques rondelles de racine de Gentiane dans de l'eau pendant quelques heures et boire cette eau à la Gentiane au long de la journée. Une idée qui peut être reprise pour aromatiser l'eau de vos gourdes et vous soutenir dans vos longues randonnées. Allez-y doucement sur la quantité de Gentiane pour que cela reste buvable !

Vous pouvez aussi vous préparer une tisane de Gentiane, sous forme d'infusion en mettant environ 2 g de racine de Gentiane sèche dans 200 ml d'eau bouillante pendant 10 minutes à couvert et hors du feu. L'acidité d'un jus de citron peut aider à supporter l'amertume.

Il vous est possible également de faire une teinture de Gentiane, en mettant 30 g de racine sèche de Gentiane dans un litre d'alcool pure à 45° et en laissant macérer pendant 30 jours, puis filtrez. A prendre à raison de 20 à 30 gouttes dans un verre d'eau avant le repas pour dynamiser l'appétit et stimuler la digestion.

Une administration traditionnelle se fait sous la forme de vin de Gentiane. Pour le préparer, vous mettrez à macérer pendant 10 jours 30 g de racine de Gentiane sèche dans un litre de bon vin blanc, puis filtrez, ajoutez 100 g de sucre. A prendre à raison d'un petit verre à Madère avant le repas. Ch'est bon pour ce qu'on a mais Ch'est fort !

Une préparation pharmaceutique comprenant de la Gentiane mais aussi du Quinquina, de l'Orange amère, du Kola, de la Cannelle, du Quassia de la Jamaïque,  a même réussi à embaucher les fameux Shadocks pour un "spot" publicitaire :




Nous allons voir que l'on peut aussi préparer avec la Gentiane des liqueurs savoureuses et qui conservent un effet bénéfique sur l'appétit et la digestion à condition d'être consommées avec modération bien sûr.

Pour cela, suivez-moi auprès de la Fée jaune .....


Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.



mercredi 27 mars 2013

A la découverte de la Gentiane


La Gentiane jaune trônait au milieu du chemin. Les randonneurs de ce GR respectaient sa haute taille (elle me dépassait, bon je ne fais "que" 1,55 mètres !) et la contournaient en la laissant à épaule droite, tel un chörten végétal ! Même les quads qui vrombissent maintenant dans nos montagnes s'écartaient sur les prés d'à côté pour ne pas la blesser.

Il faut dire qu'il se dégage de cette plante lorsqu'elle est en pleine floraison une telle vitalité qu'on en est tout ragaillardi rien qu'à la côtoyer. Sans compter que le souvenir de la saveur amère de la liqueur qu'on tire de sa racine fait s'activer par avance les papilles. Vivement la pause du soir au gîte, qu'on s'en jette un p'tit verre derrière la cravate !

Notre Gentiane jaune (Gentiana lutea) appartient à la famille des Gentianacées qui comprend plus de 80 genres et plusieurs centaines d'espèces.



Gentiana lutea est une plante vivace de 1 mètre et plus, avec une tige robuste, cylindrique et creuse et une longue racine charnue. Ses feuilles sont assez grandes (entre 20 à 40 cm de long sur 10 à 15 de large), ovales, en forme de coupelles, à 5-7 nervures saillantes et convergentes. Ses fleurs qui apparaissent entre juin et août se rassemblent en verticilles à l'aisselle des dernières paires de feuilles sur le haut de la tige. Leurs corolles jaunes se partagent en 5 à 9 parties. Les capsules allongées contiennent un grand nombre de graines.

La Gentiane jaune fleurit pour la première fois entre sa 5ème et 10ème année, puis ne refleurit que tous les 4 ou 5 ans. Sa longévité est remarquable puisqu'elle peut dépasser les 50 ans. Vous la trouverez essentiellement entre 600 mètres et 2 500 mètres, dans tous les massifs montagneux de France : Alpes, Jura, Vosges, Massif central, Pyrénées.

Dans le genre Gentiana, la Gentiane jaune possède de charmantes cousines qui ne lui ressemblent pas vraiment, en particulier les Gentianes bleues.

La Gentiane printanière
Ainsi, la petite Gentiane printanière (Gentiana verna) illumine les alpages quand l'été revient. Cette plante naine forme des tapis, où se dressent des fleurs à 5 lobes en étoile d'un bleu si intense que la rétine en est subjuguée !


Malgré l'admiration que je voue à ces Gentianes bleues, c'est de la Gentiane jaune que j'aimerai vous entretenir plus longuement , celle que l'on appelle sans vergogne Gentiane, tout court et notamment de ses propriétés médicinales.

Alors, comme on le dit dans le Pays Gentiane, en Haut Cantal "Achabar d'entrar" (finissez d'entrer) pour la suite de mon article.


Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.



mercredi 20 mars 2013

Avoir le coeur joyeux


"Par les jours de chaleur, vers midi, quand les talus font silence, le gai fenouil offre ses ombelles jaunes aux insectes fatigués des danses matinales, et les petites bêtes d'un jour qui somnolent maintenant dans les fleurs, ont uni de leurs pattes pressées le pollen au stigmate, sans savoir qu'elles étaient de noces. Quel botaniste n'a rêvé d'être un jour l'hôte des fleurs, de s'allonger dans un pétale et d'écouter passer les sèves ? Qu'il ferait bon de dormir dans le fenouil ! ".
Pierre Lieutaghi, Le Livre des bonnes herbes.

Qu'il ferait bon de dormir dans un Fenouil ! Ce n'est pourtant pas sous cette posologie qu'Hildegarde de Bingen conseille l'utilisation du Fenouil pour chasser la tristesse de l'âme et du corps.

Avec la proclamation par le pape Benoît XVI, le 7 octobre 2012, d'Hildegarde de Bingen comme Docteur de l'Église, affirmant par là "l'exemplarité de la vie mais aussi des écrits d'Hildegarde comme modèle pour tous les catholiques", il est fort probable que vous connaissiez déjà cette femme du moyen-âge, exceptionnelle à plus d'un titre.


Hildegarde de Bingen a vécu au XIIe siècle en Allemagne, dans la région de Rhénanie. Née en 1098 et décédée en 1179, son existence se déroule dans un siècle troublé : en Europe, l’empereur du Saint Empire et la papauté se disputent la suprématie en matière politique, cependant que de nombreux évêques et abbés se soucient davantage du pouvoir et de l’argent que du salut de leurs ouailles. C’est l’époque des Croisades et de la répression sanglante des hérésies. Mais depuis le monastère de Disibodenberg, puis en tant qu'abbesse de monastères à Bingen, Hildegarde va peu à peu devenir un personnage public de premier plan, reconnu comme tel par le pape, l’empereur et saint Bernard , ses nombreux voyages et sa correspondance abondante en attestent. 

Grâce aux manuscrits qui sont arrivés jusqu'à notre époque, nous pouvons avoir une trace de son savoir immense et varié. Ce savoir est d'ailleurs représentatif de l’unité des connaissances de l’époque, loin des spécialisations disciplinaires postérieures : visions, chant sacré, médecine ne font qu’un et se pensent comme un don de Dieu. L'étendue de son savoir permet donc à ceux qui le découvrent de voir en Hildegarde tantôt une naturaliste, une doctoresse, une musicienne, une prophétesse, etc.

De nos jours, certains se réfèrent à Hildegarde de Bingen comme base de soins de santé, notamment en matière de phytothérapie. Parmi les ouvrages, "Physica" et "Causae et Curae" présentent son savoir naturaliste et médical.  Ce savoir est en phase avec les concepts médicaux de l'époque mais s'y ajoute des éléments de la médecine monastique empirique et du savoir populaire. Ce qui représente pour nous un témoignage précieux sur la médecine de cette époque.

Ce qui marque toutefois le plus les lecteurs de notre époque c'est la vision "cosmo-anthropologique" d'Hildegarde : le Cosmos et l'Homme sont en inter-relation, ils sont issus de la même symphonie de l'Esprit et s'influencent mutuellement.


"De même que les éléments constituent le monde, de même ces éléments assurent au corps humain sa structure, et ils répartissent à travers l'homme leur expansion et leurs fonctions de telle manière que, par eux, il est maintenu en vie, comme ils sont répandus à travers le monde et y agissent. Dans l'homme, il y a du feu, de l'air, de l'eau et de la terre, et c'est d'eux qu'il est constitué. Du feu, il tient la chaleur du corps, de l'air le souffle, de l'eau le sang, et de la terre la substance des muscles et des os. Au feu il doit la vue, à l'air l'ouïe, à l'eau le mouvement, et à la terre sa marche."

Hildegarde partage avec son époque une conception dynamique de la Création, qui connaît dans le temps une alternance de phases de croissance et de décroissance, de chaleur et de froid, de sécheresse et d’humidité. Sa vision de l'Homme est holistique et unitaire, elle embrasse donc les notions de physique, de mental, de sentiment et de spirituel.

Les pathologies sont considérées comme venant toujours d'un déséquilibre. Ainsi, Hildgarde va expliquer la tristesse et la colère avec leurs impacts sur la santé de la façon suivante : "Lorsque l'âme de l'homme a senti quelque chose de nocif pour elle ou pour son corps, le cœur, le foie et les vaisseaux sanguins se contractent. De la sorte il s'élève au cœur comme un nuage qui assombrit le cœur de sorte que l'homme devient triste. Après la tristesse s'élève la colère. Quand l'homme a compris d'où lui vient la tristesse, alors ce nuage de tristesse qui a affecté son cœur produit une chaude fumée dans toutes les humeurs autour de la bile, met la bile en mouvement, et ainsi de l'acidité biliaire se produit la colère silencieusement. Si la colère n'a pas cessé, ce gaz s'étend sur la bile noire, l'excite, et celle-ci émet un nuage noir qui passe sur la bile...celui-ci passe au cerveau et fait perdre la tête. Puis il descend au ventre...et fait devenir l'homme insensé. L'homme s'oublie et la colère éclate. Et souvent par la colère l'être humain contracte de graves maladies, les acides biliaires et la bile noire maintes fois rendent l'homme malade"

Pour aider à rétablir un équilibre, Hildegarde va s'adresser à des remèdes de sources variées : les plantes bien sûr, mais aussi les pierres, les animaux, l'astrologie et même des invocations et rituels. L'alimentation y joue un rôle important, suivant par là, le principe d'Hippocrate "que ton aliment soit ton médicament".


Parmi les plantes considérée comme "bonne contre la tristesse", il y a le Fenouil : "Le Fenouil contient une chaleur douce et sa nature n'est ni sèche, ni froide. De quelque façon qu'on le mange, il rend le coeur joyeux; il procure une bonne sueur et assure une bonne digestion."

Au gré de ses recettes de santé, on retrouvera le Fenouil conseillé pour divers maux et sous des modalités variées : infusion, cataplasme, vin, pain et galette, etc., ou tout simplement croqué cru (graines) contre la mauvaise haleine par exemple.

Hildegarde préconise souvent de mélanger des plantes afin de créer une synergie de leurs actions. Ainsi, en cas de rhume, il est conseillé une fumigation au Fenouil, faite de la façon suivante : vous ferez chauffer une brique ou une tuile sur le feu, vous poserez dessus une poignée de Fenouil et quatre fois plus d'Aneth, vous respirerez les fumées, puis une fois le Fenouil et l'Aneth cuits de la sorte, vous les mangerez avec du pain. Hildegarde précise : "On fera cela trois ou quatre ou cinq jours jusqu'à ce que cet écoulement de la tête et des narines se fasse plus doucement et que les humeurs s'écoulent plus calmement. Car la chaleur et l'humidité du Fenouil rassemblent les humeurs qui sont anormalement diffusées et répandues et les resserrent; le froid et le sec de l'Aneth les dessèchent."

Sur le thème du "coeur joyeux" difficile de passer à côté des célèbres "biscuits de la joie" d'Hildegarde : "Prendre une noix de muscade, un poids égal de cannelle, et un peu de giroflier; réduire en poudre; avec cette poudre, de la fleur de farine et un peu d'eau, faire des petites galettes et en manger souvent: cette préparation adoucit l'amertume du corps et de l'esprit, ouvre le cœur, aiguise les sens émoussés, rend l'âme joyeuse, purifie les sens, diminue les humeurs nocives, apporte du bon suc au sang, et fortifie."

Voici une transposition moderne de cette recette, pour une dizaine de biscuits : Préchauffez le four à 180°, faites fondre doucement le beurre (50 g), mélangez y du miel (20 g), du sucre de canne (30 g), un jaune d’oeuf, une pincée de sel et les épices suivantes finement broyés : 3 g de cannelle, 3 g de muscade, 3 clous de girofle. Passez la farine d'épeautre au tamis (125 g) et incorporez au reste de la pâte,  pétrissez puis étalez la pâte sur un plan fariné (pas trop mince). Découpez les biscuits à l'emporte pièce. Glissez au four sur une plaque revêtue de papier sulfurisé, laissez cuire entre 10 à 12 minutes en surveillant la cuisson.



Les compositions musicales d'Hildegarde de Bingen sont également bien connues des amateurs de musique sacrée, fascinés par la rythmique fluide et libre, par la subtilité des enrichissements fleuris ajoutés à la ligne mélodique, son sens des répétitions, ses envolées qui invitent à la méditation. Je vous conseille d'aller faire un tour sur le lien suivant pour écouter un extrait des "chants de l'extase" : O vis aeternitatis.

Le génie exceptionnel d'Hildegarde se révèle enfin dans la dimension théologique de ses visions qu'elle commença à décrire et commenter à partir de sa quarante troisième année, utilisant un langage largement poétique et symbolique. Bernard de Clairvaux, qui assiste au synode réuni à Trèves, à la fin de 1147, par le pape Eugène III, déclara qu'il faut "se garder d’éteindre une aussi admirable lumière animée de l’inspiration divine". 

Pour rester dans le ton de cette mystique lumineuse, j'emprunte à sainte Hildegarde de Bingen la dédicace de cet article :

"La lumière que je regarde
 n'est pas liée à un endroit particulier.
Et tant que je la regarde,
 toute peur et tristesse me sont enlevées."



Je termine là mon article Z'amoureux sur le Fenouil et vais maintenant vous emmener sur les prairies montagneuses, pour découvrir "G" comme "Gentiane".


Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.


dimanche 17 mars 2013

Le Fenouil, une des 4 semences chaudes



Concentrons-nous maintenant sur le Fenouil dans ses vertus "officinales". L'essentiel de ses propriétés est dans ses graines et sa racine. Entre autres vertus, au cours des siècles, le Fenouil était considéré comme galactogène, stomachique et diurétique. Ces propriétés sont toujours celles qui sont reconnues au Fenouil de nos jours et qui ont été confirmées par des études pharmacologiques.

Ses vertus galactogènes sont toujours reconnues et l'infusion de graines de Fenouil peut être utile aux femmes qui allaitent. Il existe dans le commerce des tisanes d'allaitement qui combinent souvent le Fenouil à d'autres plantes.



Mais c'est surtout pour leurs propriétés digestives que sont encore utilisées les graines. Elles constitue en effet un excellent tonique des voies digestives utile dans divers troubles fonctionnels gastro-intestinaux : manque d'appétit, digestion lente, aérophagie, fermentations intestinales, constipation par atonie.

Sebastian Kneipp, prêtre et guérisseur allemand du XIXème siècle, à l'origine des fameuses cures de soin qui portent son nom, conseillait en 1891 : "Les graines de fenouil ne doivent faire défaut dans aucune pharmacie de famille, parce que le mal qu'elles soulagent survient très fréquemment ; je veux parler des coliques venteuses et des spasmes. Sans retard, la mère de famille fait cuire, pendant cinq à dix minutes, une cuillerée de fenouil dans une tasse de lait et donne au malade la potion aussi chaude que possible… La réaction est habituellement rapide et excellente, la chaleur s'étend vite par tout le corps, calmant les spasmes et faisant passer les coliques."

Pour bénéficier de ces bénéfices digestifs, vous pouvez préparez "sans retard" si possible, une tisane de graines de Fenouil : vous prendrez 1 cuillerée à café de graines que vous aurez légèrement concassées au mortier, à laisser infuser à couvert et hors du feu dans une tasse d'eau bouillante pendant 10 à 15 minutes, puis filtrez. Vous prendrez cette tisane à la fin des repas. Cette tisane peut être donnée aux enfants et même aux bébés à conditions d'adapter les quantités à l'âge. Utilisez pour vos petits les tisanes en sachet que vous trouverez dans les pharmacies ou commerces de santé. Vous serez ainsi sûr du dosage.

A noter que les graines de Fenouil faisaient partie des "Quatre semences chaudes" de nos anciennes pharmacopées. Ce mélange composé à parties égales de semences de Fenouil, d'Anis, de Carvi et de Cumin, était utilisé en infusion notamment pour ses propriétés carminatives, c'est-à-dire pour "bannir de l'intestin le vent qui faisait rage" comme disait nos anciens !

Mais bien sûr, pour tous ces dyfonctionnements digestifs, il sera important de suivre un certain nombre de bons conseils comme : être vigilant sur son alimentation en diminuant ou en supprimant les aliments pouvant être à l'origine de ballonnements, mettre de côté la consommation de boissons gazeuses et de bière, éviter le café, privilégier les fruits et légumes cuits, et enfin il est très efficace de s'accorder une petite marche calme d'un quart d'heure après le repas. Donc : "Aide-toi, le Fenouil t'aidera !"



De leur côté, les racines de Fenouil présentent des propriétés diurétiques. Les racines de Fenouil pourront être utilisées par les phytothérapeutes pour faciliter les fonctions d'élimination urinaire et digestive, ainsi que pour favoriser l'élimination rénale d'eau, notamment en cas d'oedème, de rétention d'eau.

Des études pharmacologiques ont permis de confirmer ses propriétés. Ainsi dans "Les plantes qui nous soignent" (2007) Jacques Fleurentin relate "Des extraits hydroalcooliques de racines, obtenus par macération dans un mélange eau-alcool de 14°, proche du vin blanc préconisé par les Grecs, exercent une action diurétique chez le rat." Par contre : "Les extraits alcooliques (alcool pur) ou aqueux (eau) sont respectivement peu actif ou inactif, démontrant ainsi le rôle du mode d'extraction traditionnel dans l'efficacité".

A titre anecdotique, voici la recette d'un vin de Fenouil diurétique : vous ferez macérer pendant 24 heures entre 20 à 30 g de racines de Fenouil (en herboristerie) dans 1 litre de vin blanc. Posologie : un demi-verre matin et midi. 


Le Fenouil n'en reste pas là, il peut aussi vous aider à avoir le coeur joyeux. C'est ce que j'aimerai vous raconter pour terminer mon article sur le Fenouil.  "Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux, qu'est-ce qu'on attend pour faire la fête, lalalala, lalalala, lalalala, ........"

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.


mercredi 13 mars 2013

Le Fenouil c'est tout un poème


"Fenouil."

Ceci est un poème. Vraiment, c'est un poème ! Composé en 1957 par François Le Lionnais, membre de l'OuLiPo (= Ouvroir de littérature potentielle). Cet hommage vibrant mais un peu bref pourra peut-être vous suggérer quelques rimes complémentaires ? Mais passons aux choses sérieuses : la cuisine.

Le Fenouil, tel que nous le trouvons aujourd'hui dans nos assiettes, aurait commencé à être cultivé en Italie , sans doute en Toscane, vers la fin du Moyen-Age. En France, Claude Mollet, jardinier de Henri IV et de Louis XIII, l'a acclimaté pour les potagers royaux. Marie de Médicis y est peut-être pour quelque chose ?

On pourrait dire que dans le Fenouil "tout est bon". Vous pourrez développer votre créativité culinaire aussi bien avec ses tiges, ses feuilles, son "bulbe", ses graines, etc. Essayons de commencer par le début et de bien finir par la fin, comme le conseillait le chapelier fou à Alice dans son pays des merveilles.

A titre de prolégomènes, je précise que le goût du Fenouil le fait réserver à ceux qui apprécient les saveurs anisées. Cette saveur provient de la présence dans la plante d'une essence riche en anéthol (comme dans l'Anis vert ou la Badiane), ce qui fait que que l'on retrouve cette plante dans la composition d'apéritifs anisés. Ah! le fameux "petit jaune" cher aux Provençaux ! Marcel Pagnol le disait ainsi : "Quand on ouvre la bouche, c'est pour boire un pastis ou pour dire une vérité. »

A tout bien , tout honneur, en hommage à Daudet et à ses Trois messes basses, voici le poisson aux tiges de Fenouil, que certains un peu marseillais appellent des branches.

C'est tout simple, d'autant plus que vous pouvez les utiliser sèches, facile à stocker dans votre placard. Pour ma part je me contente d'en glisser 2 ou 3 dans un loup portion (pour les nordiste, c'est du bar), qui sera grillé au barbecue (j'en ai un à l'électricité qui me permet de modérer la chaleur) ou cuit au fou après avoir été arrosé d'huile d'olive.


Puis, voici les fins plumets de ses feuilles filiformes. Rien de tel pour réveiller une salade un peu ennuyeuse. Bon, il faut en avoir du frais dans son jardin ou chez un maraîcher voisin.

Un exemple de Salade aromatisée aux plumets de Fenouil : vous mettrez des pommes de terre cuites à la vapeur avec des tomates, des concombre, de l'oignon blanc, arrosez avec de l'huile d'olive et du citron et saupoudrez avec une poignée de brins de Fenouil découpés au ciseau. Miam !



Bien sûr, voilà ensuite le bulbe, fais, craquant juteux. Vous pouvez le manger cru, tranché en fines lamelles et confits dans de l'huile d'olive, du romarin et du sel. Vous pouvez aussi le manger cuit en légume. Pour les amateurs de chiffres, sachez que 45 g de bulbe de Fenouil cru vous apporteront 14 calories (pas la peine de se priver), 0,6 g de protéines, 3,4 g de glucides, 0,1 g de lipides, 1,4 g de fibres alimentaires. Il contient aussi de la vitamine C et des anti-oxydants à même hauteur que les fines herbes et aromates.

 Si vous aimez innover, je vous conseille un gâteau excellent où le fenouil vient ajouter discrètement une fine pointe de saveur anisée au goût chaleureux du chocolat. Vous trouverez cette recette (sans gluten) sur le lien suivant : Le  fondant au chocolat et au fenouil. C'est vraiment bluffant !



Ensuite, les graines, indispensables dans votre armoire à épices. Vous pourrez aromatiser de multiples plats et même en assaisonner du pain fait maison. Bien qu'on les appelle communément des graines, il s'agit en fait de fruits, des diakènes (fruits secs et indéhiscents), les vraies graines sont à l'intérieur !

Pour vos invités de marque, voici une liqueur dont Madame de Sévigné disait qu'elle est "appréciée des femmes pour sa délicatesse" : La Fenouillette. Mettez à macérer plusieurs ombelles de Fenouil (ou 4 cuillerées à café de graines de Fenouil) dans un demi litre d'alcool neutre à 90% pendant 1 mois. Filtrez. Dédoublez la macération avec un sirop obtenu en faisant fondre à petit feu 250 g de sucre dans un demi litre d'eau. Mettez en bouteille et laissez vieillir 1 à 2 mois avant de consommer (avec modération bien sûr !).


Et enfin ! "Ze lassete beute note ze lissete" comme on le dit à La Ciotat : Le pollen de Fenouil, appelé "l'épice des anges". 
Vous pouvez vous en procurer dans les sites et boutiques d'épicerie fine italienne. Vous en aromatiserez des viandes, le porc ou le poulet notamment, mais aussi des crèmes ou des biscuits. 
Et là, si vous voulez briller en société, tournez-vous vers le Consulat général de France à New York qui met en ligne les recettes de son chef ! Allez, je vous laisse chercher sur la toile le "Croustillant au pollen de fenouil, fraise et crème à la vanille " de Stéphane Verdille.




Au royaume des divinités grecques, Dionysos, fils de Sémélé, qui n'était pas un triste sire, appréciait beaucoup le Fenouil. Le culte de ce dieu, de cet "enfant né deux fois", dont une de la cuisse de Zeus, est associé à la renaissance exubérante de la nature. Dans son livre "Médecines du monde", Claudine Brelet précise que Dionysos est revêtu de la peau immaculée d'un faon ou d'un cerf symbolisant l'initié au monde des divinités et des esprits de la nature. Il se couronne en janvier de Lierre symbolisant l'immortalité et l'Autre monde, mais dès que le printemps arrive au mois de mars, il le remplace par du Fenouil qui rend les yeux brillants et aiguise la vue.

A la suite des Egyptiens et des Hébreux, les Grecs appréciaient par ailleurs les propriétés médicinales du Fenouil, que j'aimerai vous décrire dans la suite de mon article.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.



samedi 9 mars 2013

A la découverte du Fenouil


Il y a de nombreuses années que l'on parle ici de désenclaver la ville. Cela passerait, disent les uns, par une autoroute. Cela passerait, disent les autres, par la remise en fonctionnement de la liaison ferroviaire. Comme rien jusqu'à présent ne se décide, le Fenouil sauvage peut continuer à pousser tranquille le long des talus et des voies ferrées. L'inaction a parfois du bon !

Les gens du crû n'hésitent pas à venir en cueillir quelques tiges pour garnir le loup qui grésillera sur les braises (le poisson bien sûr, pas le carnassier). Quel régal ! Souvenez-vous de la tentation de Dom Balaguère dans les "Trois messes basses" d'Alphonse Daudet : "Ô délices ! Voilà l'immense table toute chargée et flamboyante, ... , les flacons couleur de rubis, les pyramides de fruits éclatant parmi les branches vertes, et ces merveilleux poissons dont parlait Carrigou étalés sur un lit de fenouil, l'écaille nacrée comme s'ils sortaient de l'eau, avec un bouquet d'herbes odorantes dans leurs narines de monstres. Si vive est la vision de ces merveilles, qu'il semble à Dom Balaguère que tous ces plats mirifiques sont servis devant lui sur les broderies de la nappe d'autel, et deux ou trois fois, au lieu de dire Dominus vobiscum ! il se prend à dire le Bénédicité."


Ce Fenouil du bord des talus s'appelle Foeniculum vulgare de son petit nom latin. Il n'a pourtant rien de vulgaire. D'origine méditerranéenne, cette vivace des lieux secs a la silhouette fière et élancée (jusqu'à 2 m), le feuillage filiforme et tout en finesse et l'ombelle gracieuse et lumineuse. Pour l'ombelle, le Fenouil tient cela de sa famille : les Apiacées. Toute la plante dégage une odeur douce et aromatique, son goût est anisé.

La variabilité de ce Foeniculum vulgare est grande notamment en raison de l'emploi très ancien par l'Homme qui l'a propagé et amélioré, créant des contacts entre des groupes différents au sein de l'espèce. C'est ainsi que sont apparus les Fenouils dit bulbeux si appréciés des gourmets. En fait son « bulbe » est formé par la base des pétioles des feuilles larges et épais qui s'imbriquent les uns dans les autres.


Pour les jardiniers amateurs, autant le savoir, le Fenouil est une plante qui apprécie les climats doux, qui se cultive dans une terre légère mais riche, et surtout qui adore être baignée de lumière. Même si des variétés permettent de faire la culture du Fenouil en dehors de la zone méditerranéenne, Amis potageurs du Nord, il vaut peut-être mieux rester fidèle au Chicon !

Le Fenouil est une plante rayonnante avec ses fleurs jaunes, son odeur franche, une plante de nature solaire. En Gascogne, cueilli la veille de la St Jean, on en faisait des croix défensives, parfois mélangé à du Millepertuis. Les prudents en glissaient un brin dans la serrure chaque soir afin de tenir éloigné les coups du sort et les mauvaises intentions.

Enfin, sachez que le calendrier républicain, créé pendant la révolution, a désigné le 29 août comme jour officiel du Fenouil. Alors ce jour-là, bonne fête à tous les Fenouils !!! 

Pour la suite de mon article, j'aimerai vous emmener côté cuisine où, vraiment, le fenouil, c'est tout un poème.

Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.

dimanche 3 mars 2013

Un arbre arc-en-ciel

La base du tronc d'un Eucalyptus Arc-en-ciel

Parmi les nombreuses espèces d'Eucalyptus, Eucalyptus deglupta, originaire des Philippines, se fait remarquer par son écorce extraordinaire. En effet, celle-ci se détache en lambeaux et change de couleur en vieillissant : d'abord d'un vert pâle, elle commence par foncer avant de devenir bleue, violette puis orange et enfin marron ce qui explique le nom vernaculaire de l'arbre : l'Eucalyptus Arc-en-ciel !

En Australie, la patrie de l'Eucalyptus, c'est plutôt d'un serpent Arc-en-ciel que nous content les Aborigènes :
"Il y a bien longtemps, au temps des rêves, avant qu'il n’y ait des hommes et des femmes, des animaux et des plantes, le monde était immobile, lisse et plat. Le serpent arc-en-ciel, notre père à tous, était profondément endormi au centre de la terre. Un jour pourtant, le serpent arc-en-ciel se réveilla brusquement et sortit des profondeurs en brisant la croûte terrestre, répandant ainsi partout une pluie de poussière ocre rouge. Il se déplaça sur toute la terre, son corps creusant au passage des chaînes de montagne et de profondes gorges. Sa puissance était telle, son impact sur la terre si intense, qu'une forte pluie commença à tomber du ciel, remplissant les profondes rigoles creusées par le corps du serpent. Les points les plus élevés devinrent les montagnes et les points les plus bas se remplirent d’eau pour former les rivières et les mers. Les endroits où le serpent n’était pas passé restèrent plats et désertiques.Puis, le serpent arc-en-ciel commença à appeler toutes les créatures vivant au centre de la terre, et il leur demanda de venir peupler celle-ci. Il appela les oiseaux et les animaux. Enfin, il appela les tribus humaines. Il leur recommanda de vivre en paix et en harmonie avec leurs congénères et leur rappela qu'il fallait respecter les rochers et les arbres, et la terre elle-même".

Dans de nombreuses mythologies aborigènes, le monde et tout ce qui le compose ont vu le jour à une époque pendant laquelle les ancêtres des Hommes, qui vivaient sous une forme animale, ont parcouru le continent, créant le paysage au fil de leurs pérégrinations, mais aussi définissant le monde dans son intégralité. Cette époque d'une ancienneté inconcevable est ce que l'on appelle "le temps des rêves". "Rêve" qui renvoie plutôt à la notion de "Loi" - loi infaillible dictée par les ancêtres, ordre physique, moral et spirituel qui régit l'Univers- qu'au concept de simple vision onirique. Traditionnellement, les rituels visent à rejouer certains épisodes ancestraux les plus importants, afin de réactiver et maintenir le lien avec le Sacré.

Dans ces rituels, la peinture joue un certain rôle au côté de la musique, de la danse et du chant. Le peintre, en plus de maîtriser la technique, contrôle des récits fondamentaux dont il connait tous les détails les plus secrets, et sur lesquels il a des droits : notamment le droit de les représenter. "Ne pas peindre sa terre, c'est la laisser mourir, c'est la rendre aux ténèbres". Chaque région de l'Australie a développé pour cela une pratique qui lui est propre, fonction de son territoire.

Peinture sur écorce d'Eucalyptus
En terre d'Arnhem, grand plateau rocheux au nord de l'Australie, se trouvent des falaises abritant de nombreuses peintures rupestres, souvent figuratives, évoquant notamment des animaux et les esprits (mimih). C'est dans cette région qu'ont été collectionnées par les missionnaires puis par les ethnologues, auprès des peintres aborigènes, les premières oeuvres sur supports transportables, notamment sur écorces d'Eucalyptus. Pour créer ce support plat, les Aborigènes utilisent l'écorce de l'Eucalyptus "paper bark", qu'ils modèlent sur les braises. Si vous passez à Paris, rendez visite à "la chambre des écorces" au musée du quai Branly où vous pourrez admirer en particulier "le serpent arc-en-ciel à cornes".


Le didgeridoo, en bois d'Eucalyptus
C'est en terre d'Arnhem qu'est né le didgeridoo, trompe en bois d'Eucalyptus, qui était traditionnellement évidée par les termites, et dont l'usage s'est étendu à toute l'Australie. La vibration hypnotique que produit l'air insufflé se rapporte, selon les croyances aborigènes, au son cosmique, à la vibration originelle de l'Univers. Si vous n'avez jamais entendu jouer de cet instrument, n'hésitez pas à cliquer sur les liens suivants que j'ai sélectionné pour vous : pour découvrir le didgeridoo, un air de didgeridoo, où il est encore question du serpent arc-en-ciel. Si vous souhaitez en jouer, il vous faudra maîtriser le "souffle continu" ou "respiration circulaire". La respiration circulaire est une technique de respiration qui permet de maintenir, pendant un laps de temps assez long, un souffle d'air continu à l'aide de la bouche. La technique de la respiration circulaire consiste à utiliser la cavité buccale (la bouche, les joues pour être plus précis) comme une réserve d'air. Quand, à force de souffler, les réserves d'air dans les poumons deviennent faibles, il faut gonfler légèrement les joues (tout en continuant à souffler) pour constituer une réserve. Ensuite, lors d'une inspiration brève par le nez, il faut expulser l'air contenu dans la cavité buccale en vidant les joues. Une fois les poumons remplis, il faut reprendre l'expiration par la bouche. Pour ceux qui veulent se lancer, vous trouverez de bons conseils sur le lien suivant Leçons de respiration circulaire

Je vous ai parlé de rêves et d'arc-en-ciel, aussi pour terminer mon article sur l'Eucalyptus, j'ai choisi en guise d'épilogue un extrait de la chanson "Over the rainbow"  :

"Quelque part, au-delà de l'Arc-en-ciel,
les oiseaux volent.
Et les rêves que tu rêves,
ces rêves se réaliseront."


C'est le bonheur que je vous souhaite ! Pour la suite de mon dictionnaire Z'amoureux des plantes, j'aimerai vous faire découvrir à présent les facettes secrètes d'un compagnon de vos cuisines, avec "F" comme le Fenouil.


Merci de votre visite et à bientôt !

Philomènement vôtre.